Contes du Pays d'Azur, par Edmond Rossi
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Il y a ceux qui écrivent l’histoire et ceux qui ont besoin de lunettes pour la lire. [Michel Régnier dit Greg]

LES LUNETTES DE GRATTELOUP

les lunettes de gratteloup

« Fernand, vous prendrez bien un petit verre de vin de noix ? C’est naturel et ça ne peut pas vous faire de mal, je l’ai confectionné avec nos noix. Chaque année j’en
prépare d’après la recette de ma grand-mère. Notre petite Rosalie adore ça, vous aussi j’espère ? »
Madame Ciarlet insistait avec tant de gentillesse qu’il m’était difficile de refuser.
Le repas se prolongeait et en cet après midi du dimanche 22 octobre 1868, je n’aspirais qu’à me retrouver seul, en tête-à-tête avec Rosalie la fille de la famille.
Nous nous étions connus cet été, au festin de la Sainte Anne à Lantosque.
Ses yeux pétillants de malice et son sourire charmeur m’avaient tout de suite conquis. Le bal s’était achevé tard dans la nuit, avec la promesse de se revoir très vite.
Normalien de la toute nouvelle Ecole de Nice, j’avais obtenu ma récente affectation comme instituteur stagiaire à La Tour sur Tinée, alors que les Ciarlet résidaient au Figaret dans la vallée voisine de la Vésubie.
A vol d’oiseau nous étions proches, mais à pied il fallait compter au moins cinq heures pour aller d’un village à l’autre, et encore pour un bon marcheur. Ce qui heureusement était mon cas…
Depuis la rentrée, je venais chaque dimanche depuis La Tour, pour courtiser avec assiduité ma chère Rosalie. Nos rencontres se déroulaient dans les formes, c'est-à-dire en famille. Selon l’usage, tout devait se conclure par des fiançailles envisagées au printemps, après Pâques. Le mariage suivrait, il devait être célébré en juillet.
Le père, François Ciarlet, maréchal-ferrant réputé dans la vallée conduisait bien ses affaires. Il venait d’ouvrir avec succès un atelier au...



Vue mer : crédit photo Aseed