Dans le jardin fleuri du château de la Tour, ce bel après-midi d'août 1249, Amable de Villeneuve et ses amies écoutaient le doux poème que chantait le troubadour Olivier Polverel, en s'accompagnant d'une viole à trois cordes. Comment ne pas être tentée de connaître sous des espèces individuelles cet amour dont on leur dépeignait les tourments comme délicieux ? Timide, Olivier ne se dévoilait pas et son chant s'adressait tour à tour à chacune des dames et demoiselles présentes. Pourtant au fond de son cœur brûlait une flamme secrète pour Clarette, la fille d'Adalasie de Vence. Cette jeune fille aux yeux pers avait conservé les élans et les gaucheries de l'enfance, elle applaudissait trop fort aux couplets du troubadour, l'encourageant à s'enhardir dans l'improvisation de paroles qui faisaient rougir Mabille, sa sœur
Aînée.
Après Olivier, Guillaumes Rambaud de Lunel, dédia son « Château d’Amour », composé en cinq vers de sept syllabes et d'un sixième de rime différente, à Brunissende de Malvan, ponctuant à la harpe les rimers de chaque strophe.
Touchée par tant de grâce, Brunissende consentit à reprendre d'une voix fluette les paroles occitanes de la chanson.
Puis Arnaud de Vilar, jongleur expert, exécuta quelques numéros qui amusèrent beaucoup l'assemblée. Les jeunes pages entraînèrent ensuite ces dames dans une ronde joyeuse où les rubans et les rires se mêlèrent aux fleurs.
Après ces jeux espiègles, Aloïse d’Aspremont ramena le calme en rappelant qu'il était temps d'aller prier pour la réussite de la croisade entreprise par le saint roi Louis, frère de notre comte Charles 1er d’Anjou, et à laquelle s'étaient joints bon nombre des seigneurs de la contrée. Ainsi maris, frères, cousins, amis, tous les hommes mûrs en âge de guerroyer s'étaient embarqués à Aigues-Mortes, pour surprendre à revers les Infidèles depuis les côtes égyptiennes....